Une enquête intéressante vient d'être publiée par l'IFOP (Institut Français d'Opinion Publique) sur le bénévolat des actifs.
L'enquête porte sur un échantillon de 3013 actifs travaillant au sein d'établissements de plus de 5 salariés. Elle a été réalisée du 17 au 23 décembre 2013
Au delà d'une analyse très détaillée, cette enquête met en évidence les difficultés que rencontrent les actifs pour s'engager davantage, plus efficacement et plus durablement dans l'action bénévole. L'enqûête donne des résultats contrastés suivant l'origine socio-professionnelle des personnes interrogées, voire des résultats contradictoires, à nuancer
Qu'y apprend-t-on ?
En résumé et de manière synthétique, voici les principales "révélations" de cette enquête, à laquelle se reporter pour y trouver les pourcentages détaillés.
55 % des actifs
sont ou ont été bénévoles : les caractéristiques de leur engagement
·
Les plus âgés apparaissent plus engagés que les
plus jeunes : en effet, 60% des 50 ans et plus sont (ou ont été) bénévoles,
contre la moitié des moins de 35 ans .
·
Les cadres
supérieurs ainsi que les professions intermédiaires sont plus nombreux par
rapport aux employés et aux ouvriers
·
Les
bénévoles se recrutent davantage dans la fonction publique qu’au sein des
entreprises privées.
·
Les secteurs d’engagement par ordre
décroissant :
o
sports et loisirs (47% de salariés bénévoles)
o
action sociale (24%)
o
actions caritatives et humanitaires (17%)
o
éducation, formation, insertion (16%)
o
associations culturelles (15%)
o
défense des droits et causes (9%)
o
causes sanitaires (6%)
o
défense des intérêts économiques (2%)
·
Les hommes sont plus attirés par les
associations sportives que les femmes, celles-ci étant plus enclines à
s’investir en faveur de l’action sociale.
·
De même, les associations sportives attirent
sensiblement plus d’ouvriers (33%), alors que les cadres supérieurs s’investissent
davantage dans l’action caritative (22%), et les professions intermédiaires
dans l’action sociale (30%).
·
35% des actifs bénévoles occupent une fonction
d’élu au sein de leur association, plus fréquemment parmi les cadres supérieurs,
les hommes et les managers.
·
En grande
majorité, les actifs français bénévoles s’investissent sur leur temps personnel
et pratiquent leur activité durant leurs week- ends. Une partie non négligeable
s’investit un jour précis de la semaine et/ou consacre une partie des congés.
· L’engagement peut être de quelques heures par semaine
(35%), un jour ou plus (9%) tout au long de l’année sur un rythme mensuel. Un
quart ne s’engage que quelques heures ou quelques jours par an. Les plus âgés se
consacrent plus régulièrement à leur activité bénévole que leurs cadets.
Motivations et
obstacles
Les motivations
Les motivations
·
Le premier facteur de motivation est le désir de
défendre une cause utile aux autres
et qui leur tient à cœur (42%) (cadres supérieurs, agents de la fonction
publique hospitalière, habitants de la région parisienne et diplômés du
supérieur.)
·
La seconde motivation est liée au souhait
d’appartenir à une équipe partageant
un projet commun (bénévoles les plus âgés)
·
Vient ensuite l’envie de rencontrer de nouvelles personnes (en particulier chez les
femmes, les ouvriers, les salariés
d’entreprises publiques, les interviewés vivant seuls, ou encore ceux n’ayant
pas de diplôme).
·
Près d’un tiers des bénévoles justifient leur
engagement par leur souhait d’apporter
des compétences spécifiques à une association, ce qui est notamment le cas
des bénévoles de plus de 50 ans, des cadres supérieurs, ou encore des managers.
· De façon plus minoritaire, les bénévoles
s’investissent car ils connaissent personnellement
une association et cherchent à travers le bénévolat à développer de nouvelles compétences (notamment les salariés
d’une entreprise publique).
·
Une minorité des actifs bénévoles s’engagent car
ils ont la possibilité de le faire grâce à des horaires souples ou réguliers, parce qu’ils cherchent à exercer une responsabilité ou y ont été conduits par l’information
dispensée par leur employeur ou par leurs collègues.
Les obstacles
· Un peu plus d’un quart des actifs interrogés
déclarent avoir été bénévoles par le
passé mais avoir cessé leur engagement auprès de leur association pour des raisons personnelles et la difficulté
de combiner bénévolat et vie personnelle et familiale.
·
Plus marginalement, certains anciens bénévoles
ont cessé de s’investir dans leur association car ils avaient le sentiment de ne pas être assez compétents.
·
En dehors de la sphère personnelle, une partie
importante d’anciens bénévoles déclare avoir arrêté le bénévolat en raison d’un
conflit de cette activité avec leur vie
professionnelle (changement dans la situation professionnelle, surtout chez
les jeunes, les cadres supérieurs et les habitants de la région parisienne).
·
Les pressions
de l’employeur ou la difficulté à
combiner l’activité bénévole avec l’activité professionnelle apparaissent
fortement minoritaires. Très peu ont cessé leur engagement car ils avaient le
sentiment de ne pas pouvoir valoriser leur expérience bénévole dans leur
parcours professionnel.
·
Enfin, une partie non négligeable (le tiers) des
anciens bénévoles évoque des motifs inhérents à l’association
elle-même pour expliquer l’arrêt de leurs activités (déçus de l’organisation de l’association, déception face à des résultats jugés insuffisants, déception par rapport à leur intégration
dans l’équipe associative). A ce sujet, la répartition
socio-professionnelle détaillée est intéressante (se reporter à l’enquête).
Les incitations
·
Pour
inciter les anciens bénévoles à reprendre une activité, le facteur temps
est le principal souhait pour les actifs ayant au moins un enfant à chaarge, de même que
pour les cadres supérieurs ou les agents de la fonction publique d’Etat). Par ailleurs, une partie non négligeable des anciens
bénévoles se tournerait de nouveau vers cette forme d’engagement pour servir
une cause les touchant particulièrement ou les concernant personnellement.
·
La reconnaissance de l’expérience bénévole dans
le cadre du parcours professionnel ou acquérir une compétence nécessaire
n’inciteraient qu’une minorité des anciens bénévoles.
· Très peu s’investiraient à l’occasion d’un
évènement appelant à une large mobilisation ou pourraient redevenir bénévoles
sur une proposition de leur employeur ou encore s’ils recevaient un meilleur
accueil au sein de l’association.
Et ceux qui ne se sont jamais investis ?
·
45% des actifs interrogés déclarent
n’avoir jamais exercé une activité de
bénévolat au sein d’une association. La plupart d’entre eux expliquent
simplement que l’occasion ne s’est jamais présentée (notamment les jeunes
de moins de 35 ans).
·
Le second frein évoqué réside dans la difficulté
perçue de concilier leur vie personnelle
et familiale avec une activité bénévole (pour les personnes comptant au
moins un enfant au sein de leur foyer).
·
De même, bon nombre de non bénévoles mettent en
exergue l’incompatibilité d’un tel
engagement avec leur activité professionnelle (surtout chez les actifs
exerçant des responsabilités managériales, les plus de 50 ans et les cadres
supérieurs).
·
Une minorité des actifs non bénévoles rapporte
n’avoir aucune envie de s’investir dans ce type d’activité par manque de
connaissance du secteur associatif et des possibilités de missions bénévoles.
Ceci concerne particulièrement les moins de 35 ans.
·
L'argument selon lequel les emplois bénévoles feraient
concurrence aux emplois rémunérés reste une justification marginale pour les
actifs non bénévoles, de même que le sentiment de manquer de compétences ou le
fait de ne pas se sentir concerné par les causes défendues. Presque aucun actif
non bénévole n’évoque le fait de ne pouvoir faire reconnaitre son expérience
bénévole dans son parcours professionnel.
Les relations avec les employeurs
·
Six actifs bénévoles sur dix déclarent avoir
informé leur employeur de leur engagement, bien qu’ils considèrent que leur
employeur se montre indifférent à l’égard de cette activité
·
Le tiers des actifs interrogés estime que son
employeur adopte une attitude plutôt
favorable à l’égard des salariés pratiquant une activité bénévole au sein
d’une association.Très peu décrivent
une attitude hostile.
· Les
salariés d’entreprises publiques sont sensiblement plus
nombreux à avancer que leur employeur se
montre favorable à l’égard du bénévolat de leurs collaborateurs.
·
Les employeurs de moins de 10 salariés se
révèlent également plus favorables à une telle activité.
·
Sans surprise, les bénévoles actuels sont plus nombreux que les anciens bénévoles à
considérer que leur employeur perçoit positivement leur engagement.
·
Les hommes sont significativement plus nombreux
que les femmes à en avoir informé leur employeur, de même que les salariés
d’entreprises publiques ainsi que les actifs dont l’organisation employeuse
n’excède pas 10 salariés.
·
La plupart des bénévoles (anciens et actuels) préférant ne pas faire part de leur
engagement à leur hiérarchie, mettent d’abord en avant leur souci de préserver leur vie privée. Dans
un autre registre, un tiers d’entre eux seraient – ou auraient été – prêts à le
faire savoir dans leur milieu professionnel, mais n’ont pas eu l’occasion d’en parler. La crainte de la réaction du supérieur ou de l’employeur apparaît
comme un motif très minoritaire.
·
Les
bénévoles de 50 ans et plus sont davantage à souhaiter protéger leur vie privée, de même que les ouvriers, les salariés du
secteur industriel ou encore des agents de la fonction publique territoriale.
L’argument est plus fréquemment mentionné par les anciens bénévoles que par les
bénévoles actuels.
·
De
manière générale, près des deux tiers des actifs jugent difficile de concilier
l’activité bénévole avec son activité professionnelle et sa vie personnelle
(64%), tandis que 36% estiment l’exercice plus facile. La difficulté de conjuguer
harmonieusement le bénévolat et les activités personnelles et professionnelles
apparaît davantage soulignée par les
femmes que par les hommes. De manière attendue, les actifs n’ayant jamais
été bénévoles sont plus nombreux à partager un tel avis. A l’inverse, plus des deux tiers des bénévoles actuels
estiment que l’équilibre est en réalité, facile à trouver.
Des dispositifs
d’aménagement du temps de travail peu connus...
·
Les trois quarts des actifs interrogés déclarent
ne jamais avoir entendu parler des dispositifs d'aménagement du temps de
travail au bénéfice d’une activité bénévole au sein d’une association. Un
quart en a entendu parler mais la plupart ne sait pas exactement ce dont il
s’agit.
·
Les plus informés sont les salariés du secteur
public (30%), de même que les salariés d’une association.
·
La notoriété réelle
des différents dispositifs reste très inégale. Le congé individuel de formation
ou congé de formation professionnelle pour une activité bénévole est connu de
la moitié des interviewés. Un tiers d’entre eux a également entendu parler
de la réduction du temps de travail pour une activité bénévole. Les autres
dispositifs affichent un taux de notoriété moindre auprès des actifs (notamment
le congé de formation des cadres et animateurs pour la jeunesse, le congé de
solidarité international, le bénévolat de compétences, le congé de représentation
ainsi que le mécénat de compétences).
· Globalement, la notoriété des
dispositifs est bien plus importante auprès de certaines catégories d’actifs :
les cadres supérieurs et professions intermédiaires sont plus nombreux à
connaitre au moins un dispositif de même que les
salariés du secteur public qui sont également plus nombreux que dans le privé). De même, les actifs salariés d’une association, les managers et les actifs exerçant actuellement une activité bénévole (sont plus
nombreux à connaitre au moins l’un des sept dispositifs testés.
·
Les employeurs et les collègues de travail
constituent le premier vecteur de notoriété de ces dispositifs auprès des
actifs, suivi des medias, l’entourage personnel, une association, d’autres
bénévoles.
·
Seulement un peu plus de 10% des bénévoles ou anciens bénévoles déclarant
connaître les différents dispositifs d'aménagement du temps de travail ont déjà
eu recours à au moins l’un d’eux.
·
La plupart des dispositifs d'aménagement du
temps de travail sont utilisés à des fins de formation (dans le cadre du CIF), au bénévolat de compétence, au CSI,
ou au congé de représentation. La
plupart des bénévoles ayant utilisé le mécénat de compétences ou encore des RTT
ont assuré dans ce cadre des activités administratives au sein de leur
association.
·
Au total, sur l’ensemble des bénévoles et anciens
bénévoles interrogés, plus de 60% n’ont eu recours à aucun dispositif parce
qu’ils n’en connaissaient pas l’existence, estiment ne pas en avoir eu besoin
ou ignoraient qu’ils pouvaient en bénéficier. Une minorité pense que son
employeur pourrait s’y opposer ou ne souhaite pas que celui-ci soit au courant
de ses activités extra professionnelles.
· La
majorité des bénévoles connaissant les différents dispositifs émettent un avis plutôt positif à leur égard,
jugeant qu’ils permettent de concilier
bénévolat, activité professionnelle et vie personnelle. Dans l’ensemble,
l’utilisation de RTT pour une activité bénévole recueille les appréciations les
plus positives.
Cependant, les personnes
interrogées soulignent les deux
difficultés inhérentes à ces dispositifs, à savoir leur déficit de notoriété et le fait que
leur utilisation implique d’informer
l’employeur de ses activités extra-professionnelles. Si les personnes interrogées considèrent
majoritairement que l’ensemble des dispositifs testés sont connus du milieu
associatif, ils se montrent plus sceptiques quant à leur notoriété parmi les
employeurs et parmi les actifs pratiquant une activité bénévole.
·
Amenés à se prononcer sur leurs intentions de faire appel, à l’avenir, à l’un
des sept dispositifs, les actifs exerçant actuellement une activité de
bénévolat déclarent, pour près de la moitié d’entre eux, qu’ils pourraient
être intéressés par le bénévolat de
compétences et le recours aux RTT
utilisées pour une activité bénévole. Viennent ensuite le congé de représentation et le congé de solidarité internationale. Une
personne sur trois envisage d’utiliser le mécénat de compétences. Certains se
déclarent disposés à prendre un congé de
formation des cadres et d’animateurs pour la jeunesse ou envisagent de
recourir aux CIF ou au CFP utilisé pour une activité bénévole.
Valorisation
professionnelle de l’expérience bénévole et dispositif renforcé d'aménagement
du temps de travail, deux leviers pour favoriser l’engagement bénévole des
actifs
·
Parmi quatre hypothèses présentées, deux
hypothèses sont largement retenues par les personnes interrogées : la valorisation dans le parcours professionnel
des compétences acquises dans le cadre du bénévolat ainsi que la mise en place d’un dispositif
d’aménagement du temps de travail élargi à un plus grand nombre de
bénévoles et d’activités.
·
La majorité des répondants doute du caractère
incitatif de l’absence d’obligation de prévenir son employeur de son engagement
bénévole, sans doute parce que les bénévoles ne le font pas systématiquement à
l’heure actuelle.
·
Parmi les actifs se montrant a priori favorables
à la mise en place d'un dispositif d'aménagement du temps de travail élargi, ils
estiment en moyenne que cet aménagement devrait accorder 14 jours annuels au
bénéfice du bénévolat, la majorité souhaitant que ce dispositif soit fractionné
en plusieurs fois dans l’année. Concernant sa finalité, les trois avantages retenus concernent la conduite d’actions de terrain, la
possibilité de suivre des formations
spécifiques à l’activité bénévole et la plus grande facilité offerte pour assurer des fonctions dirigeantes au
sein des associations.
·
Sur les facteurs qui seraient susceptibles de favoriser leur engagement, les actifs
interrogés avancent en priorité leur besoin de disposer de davantage de temps libre et une prise en compte de l’activité bénévole dans l’activité professionnelle,
notamment en vue d’un assouplissement
des horaires.
·
Enfin, certains d’entre eux seraient davantage
prêts à s’investir s’ils trouvaient une association qui leur convienne en
termes de proximité géographique et de transparence, et qui puisse répondre à
leurs attentes.
·
Peu demandent une forme de rémunération du
bénévolat telle que des déductions fiscales, ou des indemnités étatiques.
·
Pour terminer, une personne sur quatre déclare
qu’aucun facteur ne pourrait l’inciter à consacrer du temps à des activités
bénévoles !
Finalement, que retenir ?
Le facteur temps est déterminant dans l'engagement bénévole des actifs.
Les dispositifs d'aménagement du temps de travail et les dispositifs d'incitation à une
activité bénévole sont mal connus, voire inconnus.
Dans tous les cas ils demeurent insuffisants aux yeux de l'ensemble des personnes
interrogées (bénévoles, anciens bénévoles et non bénévoles),
Et finalement le monde des actifs ne constituerait-il pas encore un "bassin d'emploi"
bénévole pour les associations, à condition que des mesures incitatives soient mises en
place et diffusées par les pouvoirs publics ?
Cette enquête est le point de départ de la campagne de promotion et de soutien à
l'engagement bénévole qui devrait voir la concrétisation en 2014, de mesures
annoncées afin d'élargir le champ d'application du congé de représentation et l'octroi
d'un crédit de temps annuel permettant l'exercice d'une responsabilité associative.
Un article de ce blog publié le 22 octobre 2013 "un statut du bénévole, c'est
pour bientôt ?"avait fait état de l'engagement de la ministre des sports, de la jeunesse,
de l'éducation populaire et de la vie associative pour le compte de laquelle a été réalisée