Les "Paradise Papers" l'ont une fois de plus
rappelé, s'il en était besoin : les
grandes fortunes sont diablement intéressées par la thésaurisation, sans doute nettement
moins par le don. Mais, peut-être les personnes concernées ne connaissent-elles
pas les travaux d'Elizabeth Dunn, de l'université de Colombie Britannique. Docteure
en psychologie sociale, cette "chercheure
sur le bonheur" (Happiness Resarcher) comme elle se présente sur
Twitter, s'est employée à démontrer que dépenser son argent rend plus heureux
quand on le débourse pour les autres que pour soi-même. Elle fonde cette
assertion sur les nombreuses recherches scientifiques qu'elle a analysées avec
son confrère Michael Norton, professeur de marketing à la Harvard Business
School. Les deux spécialistes des sciences du comportement rendent compte de
leurs observations dans Happy Money. The
Science of Smarter Spending (Simon & Schuster 2013, non traduit).
Sylvie Chokron, directrice de recherches au CNRS et neuropsychologue,
reprend les principaux enseignements de cet ouvrage dans une contribution au Monde du 15 novembre (supplément
"Science et médecine"), judicieusement intitulée : "L'argent fait le bonheur... quand on le
partage" :
De fait, les études montrent que surcroît de richesse ne
signifie pas nécessairement surcroît de bonheur. Pour augmenter son bien-être, rien
n'est plus rentable que d'investir son argent dans les autres. Ainsi, une prime
de 5000 dollars (4300 euros) rend des employés d'autant plus heureux qu'ils la
consacrent à des activités à caractère social plutôt qu'à eux-mêmes. De la même
manière, une étude menée sur plus de 600 foyers américains révèle que ceux qui
dépensent le plus d'argent pour des causes à vocation sociale sont ceux qui
éprouvent le sentiment de satisfaction quotidienne le plus intense, renchérit
Thibaud Eigle, fondateur de l'Ecole des finances personnelles, qui s'est lui
aussi passionné pour le travail de Dunn et Norton.
Ces constats ne sont pas propres aux seuls Etats-Unis. Une
étude Gallup menée entre 2006 et 2008 dans 136 pays plus ou moins riches, en milieu rural ou urbain, est parvenue aux mêmes résultats. Dans 120
pays sur 136, les gens qui se montraient les plus généreux en matière de dons
étaient aussi ceux qui se déclaraient le plus heureux - le plaisir suscité par
le don s'avérant indépendant de la culture ou du niveau de ressources des donateurs
. Et le sentiment de bonheur est d'autant plus fort que le sujet destine son don à une action à laquelle il croit. Autant d'informations à avoir en mémoire à l'heure où le baromètre de la générosité, publié le 4 décembre par l'association Recherches § Solidarités, établit qu'en France, le nombre de personnes ayant déclaré un don sur leur impôt sur le revenu en 2016 a reculé de 4,2% par rapport à l'année précédente : 5,28 millions de foyers fiscaux ont déclaré au moins un don aux associations contre 5,51 millions en 2015.
Pour en savoir plus
Caroline Helfter
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